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IV

Les opuscules politiques et économiques de Xénophon sont au nombre de trois, le Gouvernement des Lacédémoniens, le Gouvernement des Athéniens et les Revenus.

Montesquieu a dit : « République de Platon pas plus idéale que celle de Sparte : » c’est un trait de lumière jeté sur l’œuvre de Xénophon. En effet, si son livre est le miroir fidèle de la société façonnée par Lycurgue, il faut convenir que de telles institutions et des vertus de cette espèce ne sont point de ce monde : l’auteur de l’Esprit des Lois a raison de les attribuer malicieusement à l’histoire fabuleuse des Sévarambes. Pour le dire franchement, une cité organisée comme Sparte n’a jamais pu subsister, ou si elle a vécu quelque temps, à la honte des hommes, on ne peut considérer cette existence éphémère que comme une sorte de phénomène, pour ne pas dire de monstre, que la sociabilité humaine a dû se hâter de combattre par la contradiction et par la résistance. Nous sommes donc plutôt porté à croire que Xénophon, en louant la législation, dont l’observance a fait, selon lui, le bonheur des Lacédémoniens, en exaltant Lycurgue comme la sagesse même, s’est proposé, avant tout, de critiquer la constitution d’Athènes, de même que Tacite n’a fait l’éloge des peuples de la Germanie que pour flétrir la corruption des Romains. Une législation, au frontispice de laquelle on trouve inscrit l’échange, sinon la promiscuité des femmes, un code qui autorise le plus hideux esclavage, ne peut produire que des effets désastreux. Rousseau appelle Sparte un couvent de soldats. D’accord ; mais ne peut-on pas lui répondre avec Voltaire que c’était apparemment le couvent de Saint-Claude, « à cela près que les moines ne se permettaient point d’assassiner ni d’assommer leurs mainmortables ? » Nous ajouterons même volontiers avec l’auteur du Dictionnaire philosophique, que l’existence de l’égalité ou de la