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s’oppose à eux, réconcilie les partis et les force à se lier entre eux par des serments ; puis il franchit de nouveau le Cithéron et retourne à Mégare, où il licencie les alliés, et ramène chez lui la milice nationale.

Vivement tourmentés par le manque de vivres, les Thébains qui, depuis deux ans, n’avaient retiré aucun fruit de leurs terres, envoient à Pagares[1], sur deux trirèmes, des hommes chargés d’acheter pour dix talents de blé. Pendant qu’ils sont à acheter ce blé, le Lacédémonien Alcétas, qui gardait Oréum[2], équipe trois trirèmes, et veille à ce que rien n’en transpire. Puis, quand le blé est en mer, Alcétas s’empare des trirèmes et du blé, et prend vivant l’équipage, pas moins de trois cents hommes. Il renferme tous ces gens dans l’Acropole, où il logeait lui-même. Il avait à sa suite un jeune garçon oréite, beau, dit-on, et honnête : il descend un jour de l’Acropole pour s’occuper de lui ; aussitôt les prisonniers profitent de cette négligence et s’emparent de l’Acropole ; la ville s’insurge et les Thébains ont, dès lors, toute facilité pour se procurer du grain.

Au retour du printemps, Agésilas se trouve alité ; en effet, à l’époque où il ramena l’armée de Thèbes, il était à Mégare et montait de l’Aphrodisium[3] à la maison du gouverneur, quand une de ses veines se rompit et le sang du corps se porta dans la jambe saine[4] : la cuisse étant demeurée très-enflée et les douleurs insupportables, un médecin syracusain lui ouvrit la veine près de la cheville. Une fois en train de couler, le sang continua la nuit et le jour suivants, et tous les efforts pour l’arrêter sont inutiles, jusqu’à ce qu’Agésilas s’évanouit : c’est alors seulement qu’il s’arrête. Ramené dans cet état à Lacédémone, Agésilas y demeure malade le reste de l’été et durant l’hiver.

Les Lacédémoniens, dès que le printemps paraît, décrètent une nouvelle expédition et en donnent le commandement à Cléombrote. Quand il est arrivé avec son armée au pied du Cithéron, il envoie en avant les peltastes pour s’emparer des hauteurs qui dominent la route. Mais un corps de Thébains et d’Athéniens, qui étaient déjà maîtres du sommet, laisse avancer les peltastes : quand ceux-ci se trouvent à leurs pieds, ils s’élancent à leur poursuite et en tuent près de quarante. Dans

  1. Ville importante du littoral de la Thessalie.
  2. Ville d’Eubée, nommée aussi Histiéa.
  3. Temple de Vénus.
  4. Cf. Plutarque, Agésilas, XXVII.