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nemi. Mais il apprend que les amis de Lysandre cabalent contre lui : non-seulement ils n’apportent pas de zèle au service, mais ils sèment de méchants traits dans les villes ; que les Lacédémoniens font une grande faute en changeant les commandants de la flotte, qu’il arrive ainsi des gens sans talent, sans connaissance de la marine et de la manière de gouverner les hommes ; en envoyant des gens sans expérience et inconnus dans ces pays, ils courent grand risque de s’attirer des malheurs. Callicratidas assemble alors les Lacédémoniens présents et leur parle ainsi :

« Il m’est indifférent de rester chez moi, et, si Lysandre ou tout autre se prétend plus fort en marine, je n’ai, pour ma part, rien à opposer. Mais, comme j’ai reçu de l’État le commandement de la flotte, je ne puis faire autre chose qu’exécuter de mon mieux les ordres qu’on m’a donnés. Quant à vous, sans perdre de vue l’objet de mon ambition et les griefs qu’on a contre notre patrie, griefs que vous connaissez aussi bien que moi, dites-moi ce qui vous paraît le meilleur, de rester ici ou de m’en retourner chez moi, pour annoncer ce qui se passe à l’armée. »

Personne n’osant lui dire autre chose, sinon qu’il devait obéir aux ordres de Sparte et s’acquitter de sa mission, il se rend vers Cyrus et lui demande de l’argent pour payer ses troupes. Cyrus le prie d’attendre deux jours. Callicratidas, piqué de ce renvoi et de ses stations à la porte, se fâche et dit que les Grecs sont bien malheureux de courtiser les barbares pour de l’argent ; il ajoute que, s’il rentre jamais dans sa patrie, il fera tout ce qu’il pourra pour réconcilier les Athéniens avec les Lacédémoniens. Cela dit, il part pour Milet. De là, il envoie des trirèmes à Lacédémone pour chercher de l’argent, convoque l’assemblée des Milésiens et leur dit :

« Mon devoir, Milésiens, est d’obéir aux magistrats de mon pays, et j’espère que vous montrerez de votre côté le plus grand zèle à soutenir cette guerre, parce que, habitant au milieu des barbares, vous avez eu à souffrir beaucoup de leur part. Il faut donc que vous donniez l’exemple aux autres alliés, afin que nous fassions au plus tôt le plus de mal possible à l’ennemi, en attendant le retour de ceux que j’ai envoyés à Lacédémone pour rapporter de l’argent : car ce qui restait ici, Lysandre, à son départ, l’a remis à Cyrus comme superflu, et Cyrus, chaque fois que je me suis présenté chez lui, m’a renvoyé : ce qui fait que je n’ai pu me résoudre à être continuellement à sa