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l’on doit prendre soin de leurs pieds, afin de pouvoir manœuvrer sur un terrain rocailleux, tout le monde sachant que, quand la marche les chagrine, ils ne sont bons à rien.

Quand on a des chevaux comme il faut, on doit exercer les cavaliers, et tout d’abord leur apprendre à sauter dessus, car nombre de gens y ont trouvé leur salut ; puis à manœuvrer sur toutes sortes de terrains[1], l’ennemi se portant ici sur un point et là sur un autre. Lorsqu’ils sont solides en selle, il faut veiller à ce qu’ils sachent presque tous lancer le javelot de dessus le cheval, et exécuter les autres manœuvres des gens à cheval. Cela fait, on doit armer chevaux et cavaliers, de manière qu’ils aient le moins de mal possible, et qu’ils en fassent le plus possible à l’ennemi. Il faut aussi s’arranger pour avoir des hommes obéissants : sans cela, et les bons chevaux, et les hommes solides, et les belles armes ne serviront de rien. Veiller à ce que tout cela s’exécute ponctuellement, c’est le devoir du commandant de cavalerie. La république, convaincue qu’il suffirait difficilement seul à tant de soins, lui adjoint pour collaborateurs des phylarques[2], et ordonne au sénat de veiller, de concert avec lui, à la tenue de la cavalerie. Il est donc bon, selon moi, d’inspirer aux phylarques l’intérêt que tu prends toi-même aux cavaliers, et d’avoir dans le sénat des orateurs bien disposés, dont la parole impose aux cavaliers, qui alors feront mieux leur devoir, et adoucisse le sénat, s’il était porté à une sévérité austère. Voilà ce que j’avais à te rappeler pour les objets qui réclament ta vigilance ; mais quels sont les meilleurs moyens d’y réussir ? C’est ce que je vais tâcher d’indiquer.

Les cavaliers que tu enrôles doivent être, conformément à la loi, des citoyens aisés et robustes, et tu as pour cela deux moyens, les tribunaux et la persuasion. Je crois qu’il ne faut citer devant les tribunaux que ceux qu’on serait soupçonné de ménager par intérêt. En effet, les citoyens moins aisés auraient tout de suite un prétexte, si tu ne commençais pas par contraindre les puissants. En second lieu, je regarde comme un bon moyen de faire voir aux jeunes le côté brillant de la cavalerie ; ils en prendront le désir, et tu trouveras moins de résistance dans ceux dont ils dépendent, en leur représentant que, si ce n’est pas par toi, c’est par un autre qu’ils seront

  1. Cf. De l’Équitation, VIII, et Mémoires, III, iii.
  2. Chefs d’escadron.