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sairement quand on essaye de se tromper. On se surprend au sortir du lit, avant la toilette ; la sueur, des larmes, révèlent l’artifice ; on se voit au bain sans aucun voile. — Au nom des dieux, repris-je, quête répondit-elle ? — Que pouvait-elle faire de mieux que de cesser à tout jamais ces sortes de façons, et de se montrer toujours à moi simple et convenablement parée ? Elle me demanda pourtant, si je pourrais lui indiquer le moyen, non-seulement de paraître, mais d’être vraiment belle.

« Alors, Socrate, continua Ischomachus, je lui conseillai de ne pas rester continuellement assise comme les esclaves, mais de s’efforcer, en bonne maîtresse, avec l’aide des dieux, de se tenir debout devant la toile, pour enseigner ce qu’elle savait le mieux, ou pour apprendre ce qu’elle savait le moins : elle aurait l’œil à la boulangerie, serait présente aux mesurages de l’intendante, ferait sa ronde pour examiner si tout est bien en place[1]. À mon avis, ce serait là tout ensemble une surveillance et une promenade. Je lui dis que ce serait aussi un bon exercice de détremper le pain et de pétrir, de battre et de serrer les habits et les couvertures. Un tel régime, ajoutai-je, lui ferait trouver plus de charme aux repas, lui procurerait une meilleure santé, et lui donnerait réellement un plus beau teint. Son air même comparé à celui d’une servante, son extérieur plus propre et sa parure plus décente, n’en seront que plus engageants, surtout si c’est d’elle-même qu’elle cherche à plaire et non contre son gré. Quant à ces femmes continuellement assises avec un air de fierté, qu’on les range dans la classe des coquettes et des trompeuses. Et maintenant, Socrate, sache bien que ma femme, formée par ces leçons, se conduit comme je le lui ai montré, et vit comme je viens de te le dire. »



CHAPITRE XI.


Par quels moyens Ischomachus est robuste de corps, bien vu de ses concitoyens, cher à ses amis, à l’abri durant la guerre, et maître d’une fortune honorablement acquise.


« Aussitôt je lui dis : « Ischomachus, pour ce qui concerne les devoirs de ta femme, je crois en avoir assez entendu dès à présent, et tout cela fait complétement ton éloge et le sien :

  1. Cf. Cicéron dans Columelle, XII, iii.