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feu ne produit pas : il ignorait aussi que la chaleur du soleil est nécessaire à la vie et à l’accroissement des productions de la terre, tandis que celle du feu les fait périr : quand il disait que le soleil est une pierre enflammée, il ignorait encore que la pierre, exposée au feu, ne donne pas de flamme et ne résiste pas longtemps, tandis que le soleil ne cesse pas d’être de tout temps le plus brillant de tous les corps. Socrate conseillait d’étudier la science des nombres ; mais il recommandait, comme pour les autres sciences, de ne pas s’engager dans de vaines recherches, et il examinait et discutait avec ses disciples jusqu’à quel point toutes les connaissances peuvent être utiles. Il les engageait vivement à ne pas négliger leur santé, à consulter des gens instruits sur le régime qu’ils devaient suivre, à étudier eux-mêmes, pendant tout le cours de leur vie, quels aliments, quelles boissons, quels exercices leur convenaient le mieux, et comment ils devaient en user pour conserver la santé la plus parfaite. Il disait, en effet, qu’il était difficile à un homme accoutumé à s’étudier ainsi de trouver un médecin qui sût discerner mieux que lui ce qui convenait à sa santé. Si pourtant quelqu’un voulait s’élever au-dessus des connaissances humaines, il lui conseillait de s’adonner à la divination, lui assurant que, quand on sait par quels signes les dieux font connaître leur volonté à l’homme, on n’est jamais privé des avertissements des dieux.


CHAPITRE VIII[1].


La condamnation de Socrate ne prouve rien contre la voix intérieure dont il disait recevoir les conseils. — Résumé et conclusion des Mémoires.


Si l’on croit que l’assertion de Socrate, relative au démon qui l’avertissait de ce qu’il avait à faire ou non, tombe devant la condamnation capitale prononcée par ses juges, et le convainc de mensonge au sujet de ce génie familier, qu’on réfléchisse bien d’abord à ceci : Socrate était d’un âge assez avancé[2]

  1. Les meilleurs critiques ne doutent pas de l’authenticité vainement contestée de ce chapitre.
  2. Il avait un peu plus de 70 ans. Cf. Platon, Apolog., I ; et Criton, xiv. Socrate, né l’an 469 avant J. C, fut condamné à boire la ciguë l’an 399.