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premier rang par la vertu, nous devons leur montrer que ce rang leur appartient de temps immémorial, et qu’en essayant de le reconquérir, ils se mettraient au-dessus de tous les peuples. — Et comment le leur apprendrons-nous ? — Si nous leur rappelons, à eux qui l’ont déjà entendu dire, que dès les temps les plus reculés leurs ancêtres ont été de grands hommes. — Veux-tu parler de ce différend des dieux, que Cécrops et ses auteurs eurent à juger à cause de leur vertu[1] ? — Oui, et je veux parler aussi de la naissance et de l’éducation d’Érechthée[2], et de la guerre soulevée contre eux[3], sous son règne, par tout le continent[4], de celle qu’ils eurent du temps des Héraclides[5] avec les peuples du Péloponèse, et de toutes celles qu’ils firent sous la conduite de Thésée[6] ; toutes rencontres où ils se montrèrent supérieurs à tous leurs contemporains. Si tu veux, nous leur rappellerons aussi les exploits de l’âge suivant, qui n’est pas bien loin du nôtre, les combats[7], qu’ils ont livrés seuls à cette nation souveraine de l’Asie entière et de l’Europe jusqu’à la Macédoine, qui possédait un empire plus vaste et des ressources plus puissantes que celles de ses ancêtres, et qui avait accompli de plus glorieux travaux ; puis les victoires qu’ils ont remportées avec l’aide des peuples du Péloponèse, et sur terre et sur mer, exploits qui leur ont valu le bruit d’être supérieurs à ceux de leur temps. — Ils ont,

  1. « Suivant la fable, sous le règne de Cécrops, les dieux se choisirent des villes pour les protéger et y être honorés d’une manière spéciale. Neptune le premier, frappant de son trident la terre de l’Attique, fit jaillir de la citadelle d’Athénes la source dite Érechthéide, ou, suivant d’autres, fit sortir de terre un cheval. Minerve, en présence de Cécrops, fit croître un olivier. Les deux dieux se disputèrent le pays. Cécrops et Cranaüs, suivant les uns, Érechthée, suivant d’autres, les douze grands dieux, suivant le récit le plus accrédité, furent nommés par Jupiter pour juger la querelle. Minerve eut gain de cause, parce que Cécrops attesta que l’Attique lui devait l’olivier. » H. Martin.
  2. On peut lire, dans le Dict. de Jacobi, à l’article Érichtonius, les détails relatifs à la naissance et à l’éducation d’Érechthée.
  3. Allusion à une guerre sanglante entre les Athéniens et les Thraces sous le règne d’Érechthée.
  4. La Grèce continentale.
  5. Guerre de Hyllus, fils d’Hercule, contre Eurysthée et ses cinq fils. Beaucoup d’écrivains grecs parlent de cette guerre fameuse, Isocrate, Platon, Lysias, Aristide, Hérodote, Apollodore.
  6. Guerre contre Créon, roi de Thèbes, qui avait refusé la sépulture à Polynice et à tous les morts de l’armée argienne, contre les Amazones, filles de Mars, contre le Minotaure, contre les Centaures, contre les brigands dont l’Attique était infestée, etc.
  7. Les guerres médiques.