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vie et but des efforts incessants de son chef cuisinier.

M. Roberty possédait une grosse fortune, et il l’employait noblement, car c’était un homme de cœur. Ses travaux sont du reste appréciés, et ses récentes découvertes justifient l’estime dans laquelle le tiennent ses collègues.

Ayant perdu sa mère de bonne heure, Magda fut mieux qu’une enfant pour Jacques Roberty. Elle devint son amie, sa confidente, sa collaboratrice.

Cette belle jeune fille brune (au type si franchement oriental qu’on l’eût prise pour une Arabe de race pure, n’eût été sa toilette parisienne) n’était ni vaine ni frivole, elle n’aimait pas les plaisirs mondains et se réfugiait avec bonheur dans les beautés sereines et graves de la science.

L’étude lui plaisait mieux que le bal ou le flirt, et jamais elle ne se sentait plus heureuse que dans la vaste bibliothèque paternelle, compulsant des notes, feuilletant des livres vénérables ou bien écrivant sous la dictée de Jacques Roberty.

Magda, tant à cause de sa beauté qu’à cause de sa grande fortune, ne manquait pas d’épouseurs. Elle ne se déclarait point hostile au mariage en principe, mais n’avait jusqu’alors rencontré personne qui lui plût assez pour qu’elle se décidât à engager sa vie.

Cependant Magda, vers la vingtième année, avait eu son roman. Elle aimait un de ses cousins, bel officier de spahis ; le mariage était décidé ; l’officier, afin de pouvoir demeurer auprès de son beau-père, devait donner sa démission. Mais une expédition fut envoyée dans le sud oranais, et Frédéric Salignac y trouva la mort.

Le roman de Magda finit tragiquement ; elle en conçut une douleur que seuls le temps et le travail parvinrent à calmer. Peut-être est-ce la cause du peu d’empressement qu’apportait Mlle Roberty à s’engager dans de nouveaux liens. Le souvenir de son amour brisé était encore, après cinq ans, trop vivace et trop cruel.