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vue. Sise dans un endroit charmant, elle possède un jardin botanique qui peut rivaliser avec ceux de Buitenzorg, de Singapour et autres de renom. Nous visitons le fameux temple qui contient les reliques de Bouddha : une dent et quelques ossements. La dent vénérée fut brûlée jadis par les Portugais, mais elle ressuscita sous la forme d’une énorme dent de bœuf. Elle est exposée à la vénération des fidèles aux jours de grandes fêtes et dans les circonstances solennelles. Le prince héritier du Japon, Hiro-Ito, est passé ici, il y a quelque temps ; la dent lui fut montrée. Le temple n’a rien de bien intéressant, si ce n’est les reliques qu’il renferme. Dans une galerie, les supplices, qui attendent les pécheurs endurcis dans l’enfer bouddhiste, sont grossièrement peints sur la muraille. Dans un petit temple latéral, un bouddha de dix-huit pieds de longueur, couché, raide comme le bloc de marbre dans lequel il est taillé et doré à profusion, reçoit les prières et les fleurs des dévots. Des fleurs jaunes et blanches, d’un parfum exquis et capiteux, jonchent une longue tablette de marbre qui fait la rampe du lit sacré sur lequel repose Bouddha dans son sommeil mystique.

Demain soir, nuit sans lune, il y aura fête et illumination a giorno. La même fête se répétera chaque mois, lors de la pleine lune.

À deux heures, nous allons, à quatre milles en dehors de la ville, voir les éléphants s’ébrouer dans la rivière. Une vingtaine : des gros, des moyens, des tout petits, prennent leurs ébats, se roulent dans l’eau, lancent de la trompe des jets d’eau capables d’éteindre un incendie. Quelques-uns montent sur la berge, font des prouesses, se dressent sur les troncs de palmiers, soulèvent leurs cornacs avec leur trompe. L’un d’eux, en espoir de gros backshish, fourre sa tête dans la gueule d’une femelle qui ne semble pas savourer cette bouchée de turban sale avec autant de goût qu’une tige de jeune bananier. Les cornacs sont tellement effrontés et importuns que nous nous hâtons de fuir.