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et remise dans le tombeau. On y voit aussi une cloche qui avait été placée dans une tour et qui porte, en langue anglaise, son nom et son titre.

15 mars — À la gare d’Agra, nous sautons dans un garry attelé de deux chevaux. L’ombre des tours et des murs crénelés du fort se dessine nettement sur le ciel d’opale que la lune, en son premier quartier, éclaire à demi.

En un quart d’heure nous sommes à l’Hôtel Cecil, tenu par un Suisse, M. Hotz. Bonne chambre, bonne table, bonnes gens. Le salon est un véritable musée d’antiquités hindoues. Sous le portique, les camelots étalent leurs marchandises : cuivres, argents, marbres, ivoires. Les fakirs disent la bonne aventure et font croître, en cinq minutes, un mangoustan qui se couvre de fruits sous vos yeux ; les charmeurs sortent de leurs paniers les reptiles les plus venimeux et les laissent courir en liberté, attrapent les cobras, les pythons, les scorpions, les serpents bicéphales, qui par la queue, qui par la tête, pour les ramener à l’endroit choisi pour la représentation, lorsqu’ils s’éloignent un peu trop.

Avant-hier soir, nous avons eu un typhon accompagné d’orage électrique ; le coup de vent a été terrible ; de gros tamarins ont été déracinés et la pluie est tombée à torrents. La lampe, sur ma table à écrire, a été projetée par terre et s’est brisée en mille morceaux ; impossible de tenir les portes et les fenêtres qui se tordaient et menaçaient d’éclater. La lumière fit défaut pendant une demi-heure ; nous nous préparions pour le dîner. Les éclairs et le tonnerre rageaient ; mais le calme se rétablit enfin dans la nature et dans l’hôtellerie ; quelques minutes plus tard, chacun plastronnait à son couvert comme si rien n’eût été. Le lendemain matin, la terre était aussi sèche qu’avant — la pluie. Il ne faut pas oublier que cet orage extraordinaire a laissé tomber dans cette région la première goutte de pluie depuis quatre mois. Et cependant, les arbres et le gazon sont verts ; les fleurs, les roses surtout, sont ravissantes ; pour la première fois depuis mon départ, je m’avoue battu en fait de roses ; mon triste climat de