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rues, du riz est déposé ici et là, sur des petites tables, pour leur délectation. Ne laissez rien qui brille à la portée de maître corbeau qui s’en emparera de suite, ou vous verrez votre dé d’argent, vos épingles ou vos cuillères au bec de cet audacieux voleur, perché sur la branche de l’arbre voisin.

Je me suis enquis de la raison pour laquelle la population souffrait de se laisser écorcher les oreilles par le croassement de tant de corbeaux. Il me fut répondu qu’en outre de leur caractère sacré, ces oiseaux désagréables remplissaient aussi l’office de vidangeurs en dévorant les immondices, les détritus de la ville. D’après ce que mes yeux ont vu, ils le remplissent bien mal. Chacun sa manière de payer la taxe. Ces gens préfèrent se faire déchirer le tympan et essuyer des cartes de visite partout que de payer un salaire aux ramasse-tout ; à ce compte, ils ont peut-être raison, ces bons Birmans ; car, il est écrit que les corporations municipales, en chaque pays, auront leurs corbeaux ; l’espèce seule varie.

25-26 février — Nous visitons les bazars où tissus, légumes, tabacs, vaisselles, meubles, quincaillerie sont amoncelés. Sur les piles, les marchands accroupis attendent et servent la clientèle en fumant leurs cigares, longs de douze pouces.

Sur les arbres, un peu partout, dans les villes, les villages, la campagne, de petites chapelles rudimentaires, coquettes maisonnettes pour les oiseaux, sont dédiées par les Birmans aux nats, esprits malins qu’il s’agit de rendre propices ou moins malfaisants. Ils sont imbus des superstitions les plus étranges. Ils sont fiers et professent un grand mépris pour les Européens ; à voir comment la plupart de ces derniers se comportent à leur égard, je ne puis blâmer les Birmans. Ils prennent bien l’argent qu’on leur donne après service rendu, mais si vous leur en offrez pour faire quelque chose, ils s’en formalisent et refusent avec indignation.

Les voitures sont des plus originales ; les camions sont montés sur des roues de six à sept pieds de hauteur.