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Ce fut un jour fatal que celui où le public découvrit que la plume l’emporte en puissance sur le pavé, qu’elle est plus dangereuse dans les attaques, qu’une brique. Le public alors s’enquit du journaliste, le trouva, le développa, fit de lui son domestique actif et bien payé. C’est fort regrettable pour l’un et l’autre.

Derrière la barricade, il peut y avoir bien de la noblesse, bien de l’héroïsme. Mais qu’y a-t-il derrière un article de fond ? Du préjugé, de la stupidité, du cant, du verbiage. La réunion de ces quatre choses constitue une force terrible, et constitue l’autorité nouvelle.

Au temps jadis, on avait le chevalet de torture. Aujourd’hui on a la presse. Assurément c’est un progrès. Mais c’est encore chose mauvaise, nuisible, démoralisante.

Quelqu’un — était-ce Burke, — a dit que la presse est le quatrième État. Évidemment c’était vrai alors. Mais à l’heure actuelle, c’est en réalité le seul État, il a mangé les trois autres. Les lords temporels ne disent rien, les lords ecclésiastiques n’ont rien à