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Platon[1] réaliser ainsi la perfection de ce qui était en chacun, avec un avantage incalculable pour eux, à l’avantage infini et éternel du monde entier.

Néanmoins, ce furent des exceptions.

La majorité des hommes gâchent leur existence par un altruisme malsain, exagéré, et en somme, ils le font par nécessité. Ils se voient au milieu d’une hideuse pauvreté, d’une hideuse laideur, d’une hideuse misère. Ils sont fortement impressionnés par tout cela, c’est inévitable.

L’homme est plus profondément agité par ses émotions que par son intelligence, et comme je l’ai montré en détail dans un article que j’ai jadis publié sur la Critique et l’Art[2], il est bien plus facile de sympathiser avec ce qui souffre, que de sympathiser avec ce qui

  1. Allusion à l’allégorie de la caverne dans La République, livre VII.
  2. La Critique et l’art. Cette étude fait partie du volume Intentions, si bien traduit par M. J.-J. Renaud, (Stock, éditeur), p. 98. Elle avait paru pour la première fois dans la Nineteenth Century en juillet 1890 et en volume l’année suivante.