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les pirates de la mer

Harringay fit une double feinte rapide et accompagna son geste d’un coup de pinceau dans l’œil. On entendit un grondement étouffé.

Quatre chefs-d’œuvre.

Et le démon recracha un long jet de peinture.

Mais Harringay avait pris le dessus et entendait le garder. À grands coups précipités, il continua de barbouiller la toile, si bien qu’à la fin elle ne fut plus qu’une étendue uniforme et brillante. Un instant, la bouche reparut et articula encore : — Quatre chefs… mais elle fut aussitôt emplie de couleur ; puis, ce fut l’œil qui se rouvrit pour lui lancer un regard indigné. Enfin, il ne resta plus rien qu’un panneau couleur de ripolin sec, Pendant quelques minutes, de faibles mouvements plissèrent çà et là la surface, mais cela même finit par disparaître et la toile demeura parfaitement tranquille.

Alors, Harringay, suivant son propre récit, alluma sa pipe, s’assit, contempla avec ahurissement son tableau barbouillé de vernis-laque et s’efforça de découvrir le sens de ce qui venait de se produire. Puis il alla examiner l’envers de la toile pour voir s’il n’avait rien de remarquable ; à ce moment il regretta de n’avoir pas photographié le diable avant de l’effacer.

C’est Harringay qui raconte cette histoire et non pas moi. Comme preuve, il apporte ses véhémentes affirmations et une petite toile de 24 sur 20, enduite