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la chambre rouge

— Quoi ? — firent-ils.

— La pire de toutes les choses qui hantent le pauvre mortel, — répondis-je, — et c’est dans toute sa simplicité, la Peur ! la Peur qui ne veut ni lumière ni bruit, qui n’a rien à faire avec la raison, qui rend sourd et aveugle et écrase… Elle m’avait suivi dans le corridor, elle s’est battue contre moi dans la chambre…

Je me tus. Il y eut un intervalle de silence. Je portai la main aux bandages de ma tête.

Alors l’homme à l’abat-jour poussa un soupir et parla.

— C’est cela, — fît-il, — je savais que c’était cela, la Puissance des Ténèbres. Jeter une pareille malédiction sur une femme ! Elle demeure là, toujours ! Vous pouvez la sentir même pendant le jour, même par les plus beaux jours d’été, dans les tentures, dans les rideaux, se cachant derrière vous de quelque côté que vous vous tourniez. Quand le soir tombe, elle se glisse au long du corridor pour vous suivre et vous n’osez pas vous retourner. C’est la Peur qui habite cette chambre de femme… La Peur noire !… Et elle y restera tant que durera cette maison de malheur !…