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dans l’abîme

Le câble du palan se raidit contre la lame et fut coupé. Un remous tourbillonna sur la sphère d’une façon grotesquement impuissante. Quelqu’un agita un mouchoir ; un autre tenta une acclamation vaine ; un quartier-maître compta lentement… huit, neuf, dix. Il y eut un autre remous, puis, avec un bruyant clapotis et un large éclaboussement, la sphère reprit son aplomb.

Elle sembla rester stationnaire un instant, puis devenir rapidement plus petite ; enfin l’eau la recouvrit, et elle resta visible au-dessous de la surface, imprécise et agrandie par la réfraction. Avant qu’on ait pu compter jusqu’à trois, elle avait disparu. Il y eut, dans les profondeurs de l’eau, un tremblement de lumière blanche qui diminua jusqu’à n’être plus qu’un point et s’évanouit. Puis, il n’y eut plus rien que l’abîme des eaux ténébreuses dans lequel un requin nageait.

Soudain l’hélice du croiseur se mit en mouvement ; l’eau bouillonna ; le requin disparut dans la confusion des vagues, et un torrent d’écume s’étendit sur la cristalline limpidité qui avait englouti Elstead.

— Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? — dit un matelot à un autre.

— On va s’éloigner d’une couple de milles pour ne pas nous trouver sur son chemin quand il remontera — répondit son camarade.