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d’ordinaire assez exactement les premières représentations de la Comédie, n’a point honoré l’Apothéose de sa présence. Il fait beau, en France, d’être panthéonisé !

L’à-propos de M. Paul Delair contient certainement plus de beaux vers et plus de belles images qu’on est obligé d’en mettre dans une œuvre de ce genre. L’Océan, par exemple, dit au Gardien :


Pour te redemander l’homme que… J’arrive,
Pour te redemander l’homme que j’ai vingt ans
Vu se pencher, songeur, sur mes flots haletants.
Et tirer de mes eaux, par le vent cadencées,
Comme un pêcheur d’Ophir les perles, les pensées.


Dans la voix du poète, dans l’harmonie de ses poèmes, et là seulement, l’Océan se reconnaissait et se comprenait ; cette conscience de sa vague, de ses mœurs, de sa colère, de ses grandeurs, lui est maintenant ravie ; maintenant le poète n’étant plus là pour redire l’immensité, l’Océan ne se voit plus et ne se sent plus lui-même :


L’immensité me semble une chose incomplète
Et l’Océan n’est rien sans le contemplateur.


Très beau aussi et d’une grande expression, ce vers du Gardien :


Emprunts faits au néant, vous pasVous tous, êtres,
Emprunts faits au néant, vous passerez ici ;