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qu’il n’y a plus d’obstacle et que tout lui crie : « Ne partez pas », elle dit : « C’est bien, je pars ! » La résolution, ce semble, n’est pas très intelligible ; c’est ici qu’il faudrait appliquer, en la modifiant, l’épigramme de Chapelle sur la tragédie de Racine :


Marion pleure, Marion crie,
Marion ne veut pas qu’on la marie.


Ce qui ne contribue pas peu à la froideur du drame de Corneille, c’est que le poète y a introduit un Domitien, jeune et paré de tous les charmes. Nous ne nous faisons pas à l’idée de Domitien, amoureux et romanesque.

Ainsi la trame générale chez Corneille est aussi recherchée et compliquée qu’elle est simple chez Racine. L’entortillement et les obscurités du style de Corneille vieilli ne sont pas faits pour alléger la marche embarrassée du drame. Corneille pourtant çà et là retrouve de brusques bonds et de charmantes échappées, qui nous reportent, trente ans en arrière, vers les jours du Cid, de Polyeucte et du Menteur. Le couplet d’Albin, au premier acte, sur l’égoïsme amoureux,


Seigneur, s’il m’est permis de parler librement,
Dans toute la nature aime-t-on autrement ?


est du meilleur ton héroï-comique. On ne peut pas