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Ainsi devait paraître Tyrtée menant Sparte à la bataille.

Madame Thérésa possède sans doute encore d’autres dons. Elle a l’intelligence et le style. Elle dit, phrase et déclame avec une science et un art accomplis. Elle sait provoquer le rire et faire monter aux yeux de douces larmes. Elle frappe sec sur les nerfs et elle remue le cœur. Mais le sublime est sa qualité éminente. Par le sublime elle se distingue de ses rivales dans la diction et dans l’art du geste. Je n’ai pas l’honneur de connaître personnellement madame Thérésa ; elle a, dit-on, le caractère bon enfant ; à ce titre elle compte une légion d’amis dans le journalisme grand, moyen et petit. Aussi, à peine avait-elle paru, l’autre soir, et avant qu’elle eût prononcé un mot, une triple salve d’amitiés l’a accueillie de toutes les parties de la salle. L’émotion l’a prise ; elle a senti qu’elle allait pleurer. C’eût été du beau : pleurer en scène sans que cela soit dans le rôle ! Madame Thérésa a alors porté sa main droite, non, son poing fermé, à la hauteur du cœur et elle l’a tourné d’un mouvement subit vers le public. Ce geste énergiquement répressif de ses larmes sentait les piliers des halles. Ce geste ne pouvait pas se traduire purement et simplement par la phrase noble : « C’est trop, amis, c’est trop ; » il signifiait : « Pas de bêtise, mes bons zigues ; ne me faites pas pleu-