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cheveux. Il n’y a rien dans le Menteur qui ne vienne d’Alarcon ; et le Menteur ne contient rien qui ne soit de Corneille et qui puisse être d’un autre que lui. Admettra-t-on qu’Alarcon eût pu tenir d’une convention internationale le droit de prohiber et de confisquer le Menteur de Corneille ? Si oui, c’est prohiber la France, c’est soumettre à confiscation le génie national français.

Nous n’avons voulu traiter que de la traduction. Que serait-ce de l’adaptation ! Ç’a été pour notre langue et notre littérature un rare bonheur, ç’a été le salut que François 1er, en signant avec Charles-Quint les traités de Noyon et de Madrid, n’ait pas eu l’idée d’y joindre quelque convention annexe sur la soi-disant propriété littéraire, qui eût été analogue à celles que nous sollicitons et que nous obtenons aujourd’hui des autres nations. Pour cette seule idée qu’il n’a pas eue, François 1er mérite cent fois son surnom de « Père des Lettres ». Que fût devenu l’esprit français pendant les deux siècles où il a produit merveilles sur merveilles avec nos conventions littéraires internationales et la jurisprudence qui se greffe sur elles ! Un bon tiers de notre littérature eût été supprimé.

Notre originalité la plus étonnante est d’avoir créé, en traduisant et en imitant, la littérature la plus originale qui fût jamais. Les Français en leur