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sept pour un secret…

— Aimeriez-vous vous laver et changer de chaussures, tantine ? Il y a un bon feu dans la chambre d’ami ?

— Il y a du feu ? Du feu ? Eh bien c’est tenter la Providence, car le charbon est le charbon, et son prix ne baisse pas. Mais je ne dis pas que ce n’est pas agréable.

— Et j’ai rempli la bouilloire, en sorte qu’il y a de l’eau chaude pour votre toilette.

— Juliana, tu fais des progrès.

Venant d’elle, rare éloge. Si elle avait su la raison de ce progrès, peut-être aurait-elle tenu sa langue.

— N’oubliez pas, dit Isaïe, que le thé va refroidir et qu’il y a ici un homme qui a envie de le prendre.

Elles disparurent dans un tourbillon de jupe noire et de robe de couleur, de réticules, sacs et chapeaux.

Isaïe souriait au feu : il savait très bien pourquoi Gillian entourait sa tante de soin si affectueux.

Mais la tante Fanteague qui l’ignorait, et qui, comme beaucoup de natures rudes, avait un besoin très vif, quoique caché, de tendresse, était touchée et se félicitait d’avoir apporté un cadeau à Gillian.

— Quand je déferai ma malle, dit-elle en déplaçant instinctivement la table à coiffer pour chercher de la poussière dessous, en passant le doigt sur les surfaces polies, il pourrait bien y avoir quelque chose pour une petite fille sage.

Gillian rougit à moitié de plaisir, mais surtout d’ennui d’être ainsi traitée en enfant. N’était-elle pas Mlle Juliana Lovekin de Dysgwlfas ? Mais il n’eût pas été de bonne politique de laisser voir son agacement. Le moyen le plus pratique d’approcher du plaisir désiré lui parut être de décorder la malle que Robert avait montée par le petit escalier. C’était la malle en zinc jaune, toujours la même, qui avait emporté le trousseau de mariée de Mme Fanteague, en ce jour d’été lointain où