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SEPT POUR UN SECRET…

brin de citronnelle dans leur livre de prières, croient réellement que Dieu remarque s’ils ont mis leur veston noir le plus neuf ou simplement leur gris numéro deux, aux manches élimées ? Se figurent-ils tout de bon qu’il sent le bois parfumé ? L’essentiel est qu’ils ont leur costume le plus propre et une branche de citronnelle, car c’est une partie du plaisir de l’adoration. De même, la plus belle porcelaine et des chaises bien astiquées étaient choses capitales pour Gillian comme pour Ruth. Celle-ci ne savait pas d’ailleurs quelles chansons allait chanter Gillian, ce qui ajoutait à l’excitation de cette journée.

— Eh bien, lança Fringal en passant la tête par l’entre-bâillement de la porte, il va y avoir un fameux festin, à ce que je vois.

Ces mots se perdirent dans un éclat de rire irrésistible, car l’agitation des deux femmes, étant mystérieuse, lui paraissait extrêmement drôle. Tout ce que Fringal était incapable de comprendre, depuis l’amour maternel jusqu’à la construction d’une batteuse mécanique, était pour lui une source de comique inépuisable.

— C’est pour vous aussi, Fringal, dit Gillian avec une bonne humeur inattendue, car elle le détestait : il lui donnait toujours l’impression qu’elle n’était nullement la maîtresse de la maison. Vous viendrez pour votre thé de cinq heures au bar — elles avaient l’habitude d’appeler ainsi la cuisine — Robert y viendra aussi pour voir le maître, Ruth s’asseoira avec nous et je ferai de la musique.

Quelle plaisanterie ! Oh, quelle drôle de blague ! Fringal en était malade de joie. Jouer du piano ! Tirer des sons de cette bizarre machine de bois et de fils de fer, et puis élever la voix et — c’était son expression — miauler. Eh bien, la soirée promettait d’être très amu-