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SEPT POUR UN SECRET…

mêmes mots que sa tante Fanteague, mais ici ils n’avaient pas d’écho. Il semblait même à son imagination naïve que ces gens étaient en dehors du train-train ordinaire de la vie. Ruth buvait son thé comme si c’était un breuvage magique et Fringal mangeait ses tartines de beurre comme un marin naufragé son dernier biscuit. Elmer, lui, se contentait de la contempler, de l’admirer, ne buvait ni ne mangeait rien, mais il envoya quatre fois Ruth chercher à la cuisine différentes choses qui pourraient, pensait-il, faire plaisir à Gillian.

Fringal ne le quittait pas des yeux, fronçait le sourcil, buvait son thé à longues gorgées, puis il dit, sans raison apparente :

— Un faux-bourdon.

Personne n’y fit attention, seule Gillian désireuse d’être polie demanda :

— Que disiez-vous, monsieur Fringal ?

— Une abeille-mâle, répéta-t-il d’un ton bourru, un faux-bourdon, une reine et deux ouvrières.

— Une ruche, dit Elmer, qui avait immédiatement compris et voulait arranger les choses.

Gillian était plus intriguée que jamais.

— Vous étant la reine, expliqua le valet, et lui le faux-bourdon, autrement dit le mâle.

Gillian rit de plus belle : une fille de la campagne ne pouvait manquer de saisir l’allusion.

— Vous feriez bien de donner à manger aux cochons, dit Elmer.

— Quand j’aurai fini mon thé.

— Alors, dépêchons.

Fringal avala encore quelques biscuits de marin, puis s’en alla avec une fureur muette.

Elmer jeta un coup d’œil à Ruth qui, ayant eu à