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à rien s’il ne peut pas monter à poil la pire des carnes.

— Et alors, vous l’avez fait ?

— Et comment ?

— Qu’a-t-elle dit ? Elle vous a donné ce que vous vouliez, hein ?

— Elle n’a rien dit parce qu’elle ne l’a pas su, et je ne voulais rien.

— On ne donne et on ne prend pas grand’chose par chez vous, fit Elmer avec un lire bruyant. Elle habite de ces côtés-ci ?

— Non.

— Où donc alors ?

— Je ne m’occupe ni de ce qu’elle fait ni de savoir où elle demeure, dit fièrement Robert. Si ça ne vous fait rien, je vais galoper un peu puis revenir : le cob est assez chaud.

Et le voilà parti dans la plaine argentée où la lumière faisait l’effet de s’être congelée en gros lingots. Elmer réfléchissait tout en marchant seul. C’était une bonne région, bien meilleure que le hameau niché au repli d’une montagne dont sa ferme était un avant-poste isolé. Sa vie domestique aussi demandait des améliorations — et pourtant aucune force humaine ne le lui aurait fait avouer. Ce garçon au sourire agréable, ce serait une bonne chose de l’avoir pour compagnon le soir, surtout quand Ruth était dans ses jours d’humeur sombre. Il aurait des rideaux rouges dans la salle du bar et quantité de cuivre et d’étain (pour quoi Ruth était-elle là, sinon pour astiquer ?) et du bon whisky. Il inviterait quelquefois le vieux Lovekin pour des entretiens sérieux, et d’autre fois Rideout pour une bonne partie de rire et de beuverie. Ce Rideout, malgré ses allures graves et innocentes, devait savoir s’amuser et lui, Ralph, le régalerait de quelques-unes