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— Je le pensais bien. Je me fie à Lovekin pour trouver un bon lopin et s’y tenir. Jamais rien vu de meilleur comme qualité que les moutons de Lovekin.

— Vous êtes marchand de bestiaux vous-même ? demanda Gruffydd, penché sous le cob pour noircir le fer neuf.

— Oui, je travaille dans cette partie-là.

— Bêtes mortes ou sur pied ?

— Sur pied. J’achète pour revendre. Un peu de culture aussi.

— Vous venez de loin ?

— Du côté de Dolgelly.

— Bons pâturages ?

— Rien à dire contre. Marchés très médiocres.

— Pas de chemins de fer près de chez vous ?

— Non.

— C’est une des choses dont le maître se réjouit toujours, dit Robert, d’être si près de l’embranchement.

Quand sa vie en aurait dépendu, il n’aurait pu retenir la rougeur et le sourire provoqués par ce nom, et Gruffydd, qui sortait le cob de la forge, rit sous cape et se mit dans la tête que le jeune homme de Gwlfas avait une petite amie à l’embranchement.

— J’ai bonne envie, dit l’étranger en sautant en selle avec aisance, de faire mes paquets et de passer la frontière pour aller de vos côtés ; on y fait de bon élevage de moutons.

— Et que dirait votre bourgeoise de quitter comme ça ses amies ? dit Gruffydd tout en soufflant le feu pour achever la besogne qu’il avait interrompue.

L’étranger, se tournant à moitié sur sa selle, regarda en face le feu de la forge et dans ses yeux, scintillant à la lueur d’un rouge sombre, passa un instant une expression curieuse, pas positivement timide, pas