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Elle aurait dit pour son couronnement qu’elle n’aurait pas prononcé le mot avec plus de respect. Elles quittèrent la belle rue et en montèrent une étroite bordée de vieilles maisons noires et blanches. La lune était levée et répandait des ombres romantiques à l’ancienne mode : un pignon ne projette jamais son ombre pensive sans évoquer pour toute Juliette un Roméo possible. Des cloches se mirent à sonner leurs carillons. L’une d’elles, harmonieuse, semblait répéter six fois le mot « Juin ». Comme elles traversaient le square, on fermait partout les volets. Des pignons noirs ou blancs se penchaient de plus en plus vers Gillian, de nouvelles ombres la séduisaient sans cesse. Encore une étroite montée, puis une petite descente.

— Nous y voilà, dit la tante Fanteague. Le roulement de la brouette qui apportait la malle les suivait. Elles étaient arrivées à une petite maison brune, entre un haut mur de jardin rouge et une autre maison brune. Il y avait deux fenêtres en haut, deux en bas, deux pignons, des poutres de chêne foncé encadrant les pierres sombres, deux marches blanches usées, un heurtoir brillant.

Elles frappèrent et tante Émilie leur ouvrit. Elle se tenait grave sous un pâle éclairage, dans l’étroit vestibule, et le coucou, un peu en retard, sonnait six heures. Tante Émilie embrassa Gillian.

— Il y a des années que je ne t’ai vue, ma chérie. Comme tu as grandi !

— Tu l’as vue juste avant ton opération, dit Mme Fanteague.

— Oui, oui, ma sœur.

Gillian comprit que l’époque de l’opération serait un sujet inépuisable et lui fournirait sans doute maints renseignements utiles. La malle arrivait.