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tours à peine visible au loin, je lui arracherai les entrailles à ce sol, oui, je le ferai. »

— Oh, regardez, cria Gillian.

Là-bas, à un mille à peu près, entre deux mamelons couverts de mélèzes nus, qui semblaient en or sous le soleil de l’après-midi, montait une colonne de fumée blanche… le train.

— Dépêchons-nous, ou nous le manquons, ajouta-t-elle.

Arrivé à la gare, Robert découvrit qu’il n’avait pas un penny dans sa poche. Jolie situation !

— Je ne vous accompagne pas, dit-il d’un ton boudeur.

— J’ai pris votre billet, riposta-t-elle en riant. Vous allez venir.

Elle ordonna, gronda, supplia. Peine perdue. Finalement le chef de gare se préparait à agiter son drapeau, Robert restait obstinément sur le quai et Gillian était au désespoir : tout le plaisir de son après-midi allait lui échapper. Soudain elle se sentait seule. Elle se pencha par la portière.

— Oh, s’il vous plaît, monsieur, cria-t-elle au chef de gare, ne pourriez-vous, avec un porteur, aider mon mari à monter, il est tout perclus de rhumatismes. Avant que Robert pût s’y reconnaître, quatre bras obligeants et musclés le hissaient dans le compartiment où Gillian le recevait.

Le drapeau s’agita, le sifflet retentit, ils étaient seuls.

— Bon Dieu de Dieu ! dit Robert rouge de fureur. Si j’étais votre mari, je vous apprendrais à ne pas me traiter en imbécile… vous verriez ça.

Mais Gillian se contenta de rire.

— Oh, pauvre de moi ! J’espère que personne ne nous a reconnus ! Que dirait mon père ? Mais, j’en suis arrivée à mes fins.