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à la propriété de chacun, la condition de ne porter aucune atteinte au droit de possession à la propriété d’autrui. Antérieurement à ce conditionnement, à cette sanction, la propriété, quoique vous en puissiez dire, est déterminée naturellement en tant que possession légitime fondée sur une appropriation naturelle.

Tant que la propriété n’a pas reçu l’infusion du droit, elle reste… un fait vague, contradictoire, capable de produire indifféremment du bien et du mal, un fait par conséquent d’une moralité équivoque, et qu’il est impossible de distinguer théoriquement des actes de préhension que la morale réprouve.

Erreur, erreur complète. Avant toute intervention du droit social, de la justice commutative et distributive, ni la propriété ni le vol ne sont des faits vagues, contradictoires, d’une moralité équivoque. Ce sont des faits précis, distincts, d’une moralité certaine en bien ou en mal : l’un, comme possession légitime fondée sur une appropriation naturelle, l’autre, comme possession illégitime fondée sur une appropriation antinaturelle.

Les principes sur lesquels se fonde cette distinction sont les principes du droit naturel antérieur au pacte social. Ces principes, vous les ignorez. Vous méconnaissez la théorie de l’origine et du fondement de la propriété. Après avoir interrogé tant d’auteurs si nombreux et si divers, vous vous comportez avec cette théorie comme avec celle de la valeur d’échange : — vous n’en soupçonnez pas l’existence.

L’erreur de ceux qui ont entrepris de venger la propriété des attaques dont elle était l’objet a été de ne pas voir qu’autre chose est la propriété, et autre chose la légitimation par le droit de la propriété ;…