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PROTECTRICES DES ANIMAUX.

temps, d’autres seulement depuis quelques siècles ; mais, presque toutes les fois qu’un animal est parfaitement domestiqué, des variétés blanches ou tachetées se développent et deviennent permanentes.

On sait que les animaux sauvages produisent quelquefois des variétés blanches. On en rencontre parmi les merles, les étourneaux et les corbeaux, aussi bien que parmi les éléphants, les daims, les tigres, les lièvres, les taupes ; mais on n’a jamais vu ces races devenir permanentes. Or nous n’avons pas de statistique pour démontrer que des parents de couleur normale produisent des petits blancs plus souvent à l’état domestique qu’à l’état sauvage, et nous n’avons aucun droit de faire cette supposition tant que les faits s’expliquent sans elle ; mais il est évident que si la couleur des animaux sert réellement à les cacher et à les préserver, le blanc étant très-apparent doit leur être nuisible, et concourir à rendre leur vie plus courte. Un lapin blanc est particulièrement exposé aux attaques du busard et de l’épervier ; une taupe ou une souris blanche n’échapperont pas longtemps au hibou qui les guette. De même, une déviation de l’état normal, qui rendrait un animal carnivore plus apparent, le placerait dans une position désavantageuse en l’empêchant de poursuivre sa proie avec la même facilité que les autres, et dans un cas de disette, cet inconvénient pourrait causer sa mort. En revanche, si l’animal s’étend d’un district tempéré dans une région arctique, les conditions seront changées. Durant une grande portion de l’année, et précisément celle où la lutte pour l’existence est le plus