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LA MIMIQUE ET LES AUTRES RESSEMBLANCES


Modifications spéciales de la couleur.


Nous avons constaté jusqu’à présent une conformité générale entre la couleur des animaux et leur habitation ; nous devons maintenant considérer certains cas d’adaptation plus spéciaux. On pourra objecter que, si d’une part la couleur du lion lui est très-favorable, d’autre part les taches élégantes du tigre, du jaguar et des autres grands félins ne s’accordent pas avec la théorie. Nous répondrons que ce sont des cas d’adaptation plus ou moins parfaite. Le tigre vit dans les jungles, se cache parmi des touffes d’herbes et de bambous, et les raies verticales de son pelage peuvent aisément se confondre avec les tiges de ces plantes et le rendent ainsi invisible aux animaux dont il fait sa proie.

Il est à remarquer que, excepté le lion et le tigre, tous les grands carnassiers grimpent sur les arbres, et presque tous ont une fourrure tachetée et ocellée qui peut les dissimuler dans la forêt, tandis que le puma, qui seul possède un pelage uniforme d’un brun cendré, a l’habitude de se coucher à plat ventre sur les branches de façon à se confondre avec l’écorce, se rendant presque invisible à la proie qu’il guette.

Nous avons déjà parlé du lagopède ; un engoulevent de l’Amérique du Sud (caprimulgus rupestris) nous offre aussi un exemple curieux. Il se repose d’habitude sur de petits îlots rocheux dans le Rio-Negro supérieur, et ses couleurs extraordinairement claires s’allient à