Page:Wallace - La sélection naturelle, essais, 1872.djvu/63

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
43
INDÉFINIMENT DU TYPE PRIMITIF.

aux feuilles ou à l’écorce qu’ils habitent, s’expliquent de la même manière ; car, quoique dans le cours des âges les couleurs aient pu varier, les races que leur nuance dérobait le mieux à la vue de leurs ennemis ont dû survivre. La même cause rend compte de l’équilibre si souvent observé dans la nature : l’insuffisance de certains organes est compensée par le développement de certains autres : des ailes puissantes, par exemple, accompagnant des jambes faibles, ou une grande vélocité remplaçant le défaut d’armes défensives ; car nous avons montré que les variétés chez lesquelles existerait un défaut sans compensation ne pourraient subsister longtemps.

L’action de ce principe est exactement celle du régulateur centrifuge d’une machine à vapeur, qui arrête et corrige les irrégularités presque avant qu’elles se manifestent : de même, dans le règne animal, aucun défaut sans correctif ne peut devenir considérable, parce qu’il rend dès son origine l’existence difficile et une extinction rapide presque certaine. L’explication que nous proposons, rend compte aussi du caractère particulier des modifications de forme et de structure chez les êtres organisés : nous voulons dire les nombreuses lignes de divergence d’un type commun, la puissance croissante d’un organe spécial chez une succession d’espèces alliées et la persistance étonnante de certaines parties peu importantes, comme la couleur, la texture du poil ou du plumage, la forme des cornes ou des crêtes, dans des séries d’espèces dont les caractères essentiels sont très-différents. Elle donne aussi une