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DÉVELOPPEMENT DES RACES HUMAINES

dus d’une même souche varient de toute façon dans tous leurs organes et dans leurs fonctions.

Ceci posé, la santé, la force, une vie longue, ont pour condition l’harmonie entre l’individu et l’univers qui l’entoure. Supposons qu’à un moment donné, cette harmonie soit complète : un certain animal est parfaitement conformé pour s’assurer de sa proie, pour échapper à ses ennemis, résister aux intempéries des saisons, et pour élever une descendance nombreuse et saine. Mais voici qu’un changement se produit. Il survient par exemple une série d’hivers rigoureux qui rend la nourriture plus rare, et cause une immigration d’autres animaux qui font concurrence à ceux du district. Le nouvel arrivé est rapide à la course, et surpasse ainsi ses rivaux dans la poursuite du butin ; les nuits sont plus froides et exigent la protection d’une plus épaisse fourrure, ainsi qu’une alimentation plus riche pour maintenir la chaleur du corps. L’animal que nous supposions parfait a donc cessé d’être en harmonie avec le milieu où il vit, il court le risque de succomber au froid ou à la faim. Mais ses descendants ne sont pas tous identiques. Quelques-uns sont plus rapides que les autres : ils réussissent alors à se procurer une nourriture suffisante ; d’autres sont plus robustes et doués d’une fourrure plus épaisse, et conservent ainsi leur chaleur durant les nuits froides. Les autres, plus lents, plus faibles, moins bien fourrés, s’éteignent bientôt.

Il en est ainsi successivement à chaque génération ; c’est le cours naturel des choses, tellement inévitable qu’on ne saurait le concevoir différent : ceux qui sont