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LES PAPILLONIDES DES ÎLES MALAISES.

rien, car il suppose déjà résolue la question même qu’il faut décider ; celui d’une origine distincte est toujours inapplicable ; enfin, le fait que les espèces ne se mélangent pas est sans valeur, sauf pour les cas rares de formes alliées de près et habitant la même région ; il est donc évident que nous n’avons aucun moyen quelconque de distinguer les soi-disant vraies espèces, des nombreuses variétés dont il s’agit ici, et avec lesquelles elles se confondent par une gradation insensible.

Il est parfaitement vrai que, dans la grande majorité des cas, les formes que nous appelons « espèces » sont si tranchées et si bien définies, qu’il n’y a pas de divergence d’opinion à leur sujet. Mais, comme la pierre de touche d’une théorie vraie consiste en ce qu’elle explique l’ensemble des phénomènes, même ceux qui constituent des anomalies apparentes du problème, ou tout au moins se concilie avec eux, il est rationnel d’exiger que les personnes qui rejettent l’origine des espèces par variation et sélection, s’attaquent aux faits en détail, et montrent que la doctrine de l’origine distincte et de la permanence des espèces, les explique et les relie. Le Dr  J. E. Gray a récemment affirmé (Proceedings of the zoological Society, 1863, p. 134), que la difficulté de déterminer les espèces est en proportion de notre ignorance, et que leurs limites deviennent plus claires, à mesure qu’on étudie plus en détail, et qu’on connaît mieux les groupes et les pays. Comme beaucoup d’assertions générales, ceci est un mélange de vérité et d’erreur. Il y a indubitablement beaucoup d’espèces qui étaient incertaines aussi long-