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LES PAPILLONIDES DES ÎLES MALAISES.

des exemples du dimorphisme le plus simple, puisque la descendance n’offre jamais de variétés intermédiaires entre les formes des parents.

L’exemple suivant fera bien comprendre en quoi consistent les phénomènes de dimorphisme et de polymorphisme ; supposons qu’un Saxon, aux yeux bleus et aux cheveux blonds, ait eu deux femmes, l’une, Indienne Peau-Rouge aux cheveux noirs, l’autre négresse aux cheveux laineux, et que les enfants, au lieu d’être des métis, de couleur brune ou noirâtre, combinant, à des degrés divers, les caractères respectifs des parents, fussent, les garçons, de purs Saxons comme leur père, les filles, Indiennes ou négresses comme leurs mères. Ce fait paraîtrait déjà suffisamment merveilleux ; et pourtant les phénomènes cités ici comme ayant lieu dans le monde des insectes, sont encore plus extraordinaires ; en effet, chaque mère peut donner le jour, non-seulement à un mâle semblable au père et à une femelle semblable à elle-même, mais elle peut aussi en produire d’autres, exactement semblables à la seconde forme femelle, et entièrement différentes d’elle-même.

Si l’on pouvait peupler une île par une colonie d’êtres humains possédant les mêmes idiosyncrasies physiologiques que le Papilio Pammon ou le P. Ormenus, on verrait des hommes blancs vivre avec des femmes jaunes rouges ou noires, et leur descendance reproduire toujours les mêmes types, en sorte qu’au bout de plusieurs générations, les hommes seraient encore blancs purs, et les femmes appartiendraient toujours aux mêmes races distinctes qu’au commencement.