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ANTHOLOGIE DES POÈTES FRANÇAIS


Tes croix penchent aux calvaires abandonnés,
Sur le ciel maintenant plus âpre et plus sauvage.
Le vent s’affole et la tempête se propage...
Laisse choir sur le sol tes vieux bras décharnés !

Laisse choir sur le sol tes mains désespérées !
Pour relever tant de misères effondrées,
Ton geste était trop pur, ton geste était trop beau.

Ton geste n’a pas pu faire naître les trêves.
Rentre, ô Christ, ô toi le dernier de nos grands rêves,
Dans l’oubli plus puissant que ton premier tombeau !


V

Tombe, éternelle nuit, sur toutes ces misères !
Tombe, éternelle nuit, sur toutes ces douleurs !
Rien n’a pu nous sauver, ni le sang, ni les pleurs ;
Nos blasphèmes sont vains et vaines nos prières.

Engloutis à jamais nos misérables cœurs,
Nos lâches cœurs plus froids et plus durs que les pierres !
Nous sommes las d’errer dans la nuit sans lumières.
L’ombre règne. La haine et le mal sont vainqueurs.

Sous le ciel implacable où meurent les étoiles,
Épave désormais sans rameurs et sans voiles,
Le monde, comme un vieux navire, peut sombrer ;

Sûrs de notre impuissance et de notre défaite,
Nous jetterons nos corps liés à la tempête.
Nous savons le néant de croire et d’espérer.