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Mais sa face est muette et comme sans regard...
La chambre s’enténèbre et la veilleuse est morte.

Tout à coup je me dresse, et, baigné de sueur,
Je repousse les draps de mes mains maladroites.
Le mur s’est éclairé d’une rouge lueur...
Un sang tumultueux bat dans mes tempes moites.
 
C’est le feu qui reprend, et mes yeux éblouis
Par la flamme éclatante au reflet de la glace
Cherchent le spectre blanc qui s’est évanoui...
Que douloureusement ma tête est lourde et lasse !

La pendule, là-bas, palpite comme un cœur,
A travers les rideaux filtre un rayon lunaire...
J’ai soif : oh ! le jardin plein d’ombre et de fraîcheur
Où parmi les rosiers chante une source claire !...
(Sonates au clair de Lune.)

La pièce suivante fut écrite le 25 avril 1909, pendant la dernière maladie du poète. « La fièvre augmentait toujours. On lui avait interdit d’écrire. Mme Prouvost devait éloigner les papiers et la plume. Il se résignait à tout, sans une plainte, sans un murmure. Il y avait des minutes, cependant, où l’émotion l'étouffait. Il était las de prier en prose, ses oraisons solitaires ise scandaient d’elles-mêmes dans la langue des poètes. Alors i1 cherchait autour de lui ; une ordonnance de médecin lui tombait sous la main et il écrivait sur ce chiffon les mots qu’il venait de dire à Dieu... » (C. LECIGNE.)



Fais-moi souffrir, Seigneur, car je veux expier
Mes fautes du passé, lourd et amer calice
Qu’abreuve le remords ; oh ! laisse-moi prier
Pour laver mes péchés dans l’eau du sacrifice.

Je mets ma volonté, Seigneur, entre vos mains.
Mon âme est calme ainsi qu’un beau lac à l’aurore.
Je ne réfléchis plus au sort des lendemains,
Je m’abandonne à toi, fais-moi souffrir encore.

Je veux souffrir encor, car douce est la souffrance
Lorsque l’offrande, ainsi qu’une flamme, vers toi
Monte pure, et qu’armé de pleine confiance,
Mon cœur entend chanter la consolante voix.