Page:Walch - Poètes d’hier et d’aujourd’hui, 1916.djvu/348

Cette page n’a pas encore été corrigée

L'USINE

Dans l’enchevêtrement multiple des courroies,
Les longs arbres de couche alésés et brillants
Tournent, le jour entier, sur des paliers brûlants,
Et meuvent les volants qui sifflent et giroient.

Les cardes à tambour, qui laminent leur proie,
Ont leurs rouleaux couverts d’un léger duvet blanc,
Et la bobine au banc étire, en l’enroulant,
La laine qui, dans l’air, en flocons fins poudroie.
 
Et les fils, allongeant leurs délicats réseaux,
S’envident, peu à peu, sur les minces fuseaux ;
Et devant le travail des robustes têtières,
 
Entraînant sans répit les broches des métiers,
Dans l’effluve énervant des fiévreux ateliers...
Je songe aux vieux rouets des paisibles grand’mères !...
(Le Poème du Travail et du Rêve.)

NUIT DE FIEVRE

Gnomes et farfadets, sylphides et follets,
De la frise sculptée arrachant les guirlandes,
Dans le blême plafond que des feux violets
Illuminent soudain dansent des sarabandes.

Aux tentures s’agriffe une chauve-souris
Qui couvre le décor de ses flasques membranes ;
Caché dans les rideaux un vieux Faune sourit
Au désir d’enlacer d’illusoires Dianes.

Et, vibrant dans la nuit, des harpes, des hautbois,
Des cors graves, plaintifs, des violes énervantes,
Modulent lentement pour la centième fois
Les mêmes adagios et les mêmes andantes.

Devant mon lit quel est ce fantôme blafard ?
Serait-ce lui qui vient de frapper à ma porte ?