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… Je vois l’apostasie et les temps incrédules ;
Les sages confondus accuser le destin,
Et des hommes sans nom sortir des ergastules
Pour lancer l’anathème ù leurs fronts sibyllins.
Les tribuns ont couvert la voix des patriarches,
Qui des cathèdres d’or outragés au concile,
Entraînent dans leur robe où choit leur pas sénile
Les grands flambeaux éteints qui roulent sur les marches.
O nature ! eit-il vrai que tu n’as point parlé ?
L’homme a bravé les dieux dont mentaient les exemples,
Et, fauve, a ramassé, quand le faite a croulé,
La pierre meurtrière aux gravats de leurs temples.
Hélas ! sous ton dédain, crut-il à sa conquête ?
Je vois le victimaire et j’entends les supplices,
Et par des hosannah qui te savaient muette,
Ta gloire et tes soleils attestés pour complices !
Ah ! pourquoi tout cela, la révolte et son crime,
Et toujours la vindicte à son geste impuissant,
Si ce n’est pour noyer, dans un spasme et du sang,
Ce sanglot d’espérance ù jamais qui l’opprime !
Ce sanglot que longtemps il contient sur sa couche,
Mais qui, trop gros d’angoisse, un jour, et plein de fiel,
De son cœur ulcéré lui remonte à la bouche,
Et fait de sa prière un blasphème à ton ciel.
Ah ! que réclame-t-il dont tu lui fus avare ?
Ce n’est point pour le pain qu’ont trahi ses semailles
Que ricane à ses dents cette àpreté barbare :
Son tourment, né d’ailleurs, n’atteint pas ses entrailles.
Mais c’est lui dont sans fin tu le voulus poursuivre
Lorsque, dans sa pensée éveillant ton mystère,
Tu créas, par delà son morne instinct de vivre,
La susperstition du bonheur sur la terre.
De ce bonheur lointain dont parlent les étoiles,
Et dont tu lui jurais que rien ne désappointe,
Lorsqu’il en croyait voir errant parmi tes voiles
Le présage éternel flotter vers ses mains jointes…
Et dont le pressentaient ta douceur infinie
Dans tout ce qui s’éveille aux souffles du printemps,