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Néoptolème, àme cliarmante et chaste tête,
Dont je serais en mémo temps le Philoctèlc
Au cœur ulcéré plus encor que la blessure,

Et par un conseil froid et bon parfois l’Ulysse, —
Artiste pur, poète où la gloire s’assure,
Cher aux Lettres, cher aux femmes, Charles Morice.

A ce portrait lyrique il convient de joindre celui-ci, par Jean, Dolent : « Dédaigneux des lieux accessibles, tout à son rêve, le « Rêve do l’iufini », il va. Ah ! quand Morice parle ! il rejoint la simplicité au delà de l’emphase. Sa conception du bonheur est la recherche de l’harmonie par le chiffre d’un contour et la couleur ; son désir s’élève vers une beauté redoutable, une beauté aggravée de mystère…

« Disposant de la grande prose et du vers, maître des formes, lucide, il va lentement avec une mollesse tragique ; après le deuil des beaux premiers espoirs, il va, tout enrubanne d’espoirs nouveaux. Ses rêves et mes rêvasseries souvent se croisent. Il juge, et ses fureurs d’artiste répondentà mes cruels désirs. Il se juge, et sa douleur et son orgueil en sont accrus.

« Ses vers sont des fleurs belles et jolies qui semblent cueillies autour des grandes tombes, tombes de poètes, tombes d’amantes, fleurs couleur de sang, fleurs couleur de neige ; et si dans les bois un matin il musarde, c’est un livre ouvert à la main.

« Il va…

« Seul. » (Portraits du Prochain Siècle.)

M. Charles Morice, disciple de Stéphane Mallarmé, est l’un des théoriciens du symbolisme, ou, si l’on veut, a été le théoricien d’un symbolisme.

M. Charles Gidel écrivait dès 1891 : « M. Verlaine a déjà perdu la direction de l’Ecole symbolisto. Sous ses yeux, un nouveau groupe s’est choisi un nouveau maître. Esthètes nouveaux, Jeunes Ephèbes, suivent l’enseigne aujourd’hui de M. Charles Morice, auteur d’un volume intitulé : La Littérature de tout à l’heure (1889). Ces Symbolistes émancipés ne sont, à vrai dire, ni une école, ni une coterie ; ils sont un groupement flottant. Ils adorent, sans s’y rattacher tout à fait, ViUiers de L’Isle-Adam, Stéphane Mallarmé, Paul Verlaine, mais ils poussent plus loin la doctrine de ces poètes. Ils répudient les traditions dont la littérature a vécu jusqu’ici. Ayant en protonde horreur le convenu et le vulgaire incapable de produire rien de parfait, ils proclament ce principe : l’art doit être vague et nuageux. Il est un composé d’irréel et de fluide. Il rejette tout ce qui est net. clair, fixe, car la nature du beau est d’essence insaisissable. Suivant M. Charles Morice, le Réalisme n’était qu’un bas-fond vaseux ; le Naturalisme ne voyait les choses que par en bas ; il était devenu nécessaire de regarder en haut et d’y chercher un Idéal :