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Vague, indécis, presque rêvé,
Un pâle souvenir d’enfance,
Un beau vers qui chante d’avance
Dans un poème inachevé,

Un air au piano, doux et triste,
Où rit en pleurs tout le passé,
Un vieil air joyeux et cassé,
Mélancoliquement artiste ;

Tout cela que l’on ne sent bien
Que dans sa chambre solitaire,
Tout cet infime et grand mystère
Qui brode le quotidien,

Tout ce qui fait au bord du monde
L’esprit comme un cœur palpitant,
Miracle éternel de l’instant,
Brusque infini de la seconde,

Tout le secret un peu divin,
Que tout me révèle et que j’aime,
Ah ! voilà ma vie, et moi-même !
Et le reste, le reste est vain !


IL PLEUT


Il pleut,
Les vitres tintent.

Le vent de Mai fait dans le parc un bruit d’automne.
Une porte, en battant sans fin, grince une plainte
Mineure et monotone.
Il pleut…

On dirait par moments qu’un million d’épingles
Se heurte aux vitres et les cingle.
Il pleut,
Les vitres tintent.

Le ciel cache un à un ses coins légers de bleu
Sous de rapides nuées grises.
Il pleut :
La vie est triste !