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Mais une nouvelle période d’activité littéraire s’ouvre pour M. de La Tailhède. Il s’attache à M. Jean Moréas, rencontré auparavant et depuis longtemps admiré, et il le reconnaît pour son maître. A ses côtés et de concert avec MM. Maurice du Plessys, Charles Maurras et Eruest Raynaud, il participe à la formation de l’Ecole romane marquée à son aurore par la manifestation célèbre à laquelle donne lieu, en 1891, l’apparition du Pèlerin passionné.

En 1895, M. de La Tailhède publie un recueil, De la Métamorphose des Fontaiues, dans lequel sont appliquées les « nouvelleslois de la poésie lyrique ». Après un studieux séjour aux champs, qui fait dire à M. Anatole France : « Haymond de La Tailhède vit seul à Moissac, parmi ses livres, possédé de rêveries lentes qui deviennent parfois des poèmes », — M. do La Tailhède rentre à Paris, où il prépare des œuvres de large envergure et d’une forme toujours plus accomplie. Sou prochain volume devers renfermera notamment deux poèmes à la réalisation desquels il a consacré plusieurs années : Orphée et Prométhée.

SONNET

A UN PETIT ENFANT

Toi qui rêves toujours, ne parlant pas encorer
Petit enfant roynl par le bleu de tes yeux,
Vois-tu la flamme orientale de l’aurore
Qui se lève sur ton sommeil silencieux ?

Vois-tu toute la mer périlleuse et joyeuse ?
De lourdes visions émergent des brouillards
A travers la lueur d’une lune frileuse,
Et de grands cavaliers portent des étendards…

Si, dans la nuit ou dans le jour, lorsque tu rêves,
Tu vois ce ciel doré, si tu vois cette mer,
Aux heures des douleurs tes douleurs seront brèves-.

Quand la vie aura fait ton esprit plus amer,
Tu te rappelleras ces fantômes magiques
Pour t’endormir au souvenir de leurs musiques.
1887.