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ENVOLEE


Il est parfois des jours ou l’on rêve d’espace,
Où tout nous semble étroit, où tous les horizons
Oppriment le désir de s’envoler qui passe
En nous, comme un parfum d’avril dans les prisons.

Alors rien ne paraît assez grand pour nos âmes,
Ni les abîmes clairs où vibrent les soleils,
Ni les océans bleus qui déroulent leurs lames
Jusque dans la splendeur des grands lointains vermeils.

Par delà les sentiers, les rocs, les altitudes,
On voudrait s’en aller, fou d’espace sans bords.
C’est comme un souvenir de vastes solitudes
Où nos âmes planaient en de larges essors.

Fouetté par le vent froid des intimes angoisses
Dont le chaos obscur encore gronde en nous,
Où planais-tu si libre, 6 pauvre être qui froisses
Ta tête à tous les murs, ta main à tous les clous ?

Toi qui suivais le vol des aubes immortelles
Vers le berceau rieur où le blond soleil dort.
Qu’as-tu fait des frissons dont tressaillaient tes ailes ?
Où donc les laissas-tu tomber, tes ailes d’or ?


{Chants d’aurore.)


CHANT DE GUERRE


Le vent gémit, le vent apporte
L’immense rumeur des combats !
Vois passer la noire cohorte,
Le sol tressaille sous ses pas.
L’air est rouge, les cieux livides,
Sous le vol des corbeaux avides.
Venus là pour ronger les morts ;
Et dans l’ardente chevauchée,
Ainsi qu’une moisson fauchée,
Tombent les braves et les forts !