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Sous leurs dômes flottants Toi autels de verdure
Reconnaissent les pas du pèlerin lassé,
Qui, s’échappant d’un monde où rien de bon ne dure,
Par vos sentiers secrets retourne à son passé.

IV


Entre nos jours mortels, inexplicable rêve,
Et cette éternité qui suit le Jugement,
O bois ! accordez-nous le bienfait d’une trêve,
Une heure de repos et de recueillement.

Laissez-nous, à l’abri de vos temples sévères,
Méditant des vertus que le siècle proscrit
Et qui firent l’honneur du destin de nos pères,
Une dernière fois les revivre en esprit ;

Revivre les saisons divines de l’enfance,
Quand une route en fleurs sans fin se déployait,
Quand la mort, qui vers nous rapidement s’avance,
Était si loin, si loin qu’à peine on y croyait 1

Quand ceux qui nous aimaient d’une tendresse unique,
Dessus et dessous terre aujourd’hui dispersés,
Nous préparaient l’accueil du foyer domestique.
Prenant leur part des maux dont nous étions blessés.

V


Beaux arbres flagellés vainement par la pluie,
Restés droits sous l’assaut furieux des hivers,
Si l’orage s’apaise, un rayon d’or essuie
La nappe ruisselante à vos feuillages verts.

Un exemple sacré plane dans vos ramures,
Ces échelons du rêve entre la terre et Dieu :
Nulle révolte au fond de vos puissants murmures,
Nul orgueil dans l’élan qui vous porte au ciel bleu 1

Déchiré sourdement de regrets et de crainte,
Vers vous, ô calmes bois ! me voici revenu,
Et je m’attache à vous d’une suprême étreinte.
Dans l’effroi de partir pour un monde inconnu.

Ne me refusez pas la halte sous l’ombrage ;
Pareils à l’oasis qu’on trouve à mi-chemin,