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LE BANC


Autour du banc, où nous venions aux crépuscules,
L’épine croit sur les sauvages renoncules.
J’ai roulé de mes mains des rocs pour mieux fermer
L’entrée ; et d’autres, là, ne viendront pas s’aimer.
Le chèvrefeuille pend à la branche du frêne,
Comme pour nous ; partout pousse la folle graine.
Sur le tertre muet, à l’abandon et clos,
Le banc de pierre a l’air d’une tombe au repos.
La nuit, plus qu’autrefois, y descend solennelle,
Et je n’ose approcher, même d’un pas fidèle,
Quand, sur le passé mort et sacré du vieux banc,
La lune glisse et vient poser un bouquet blanc.


(Le Banc de pierre.)


RECUEILLEMENT


Quand je me penche sur tes yeux,
J’y vois dormir un clair de lune
Aux reflets fauves et soyeux,
Comme il en rêve sur la dune.

Tu t’enveloppes de repos
Et voiles jusqu’à ta pensée.
Sous les longs cils où tu t’enclos,
Par le jour trop aigu blessée.

Et ces yeux où la lune dort,
Sans caresses et sans bravades,
Calmes et tournés vers la mort,
Semblent chercher des cœurs malades.

Beaux yeux, couleurs des soirs d’été
Mystérieusement sublimes,
Vous êtes comme la clarté
Qui blanchit l’ombre des abîmes.


(Le Banc de pierre.)