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« La psychologie littéraire de M. Catulle Mondes, a dit fort bien M. Octave Mirbeau, malgré les apparentes complications que suppose la diversité de son œuvre, est aisée à fixer. Elle se résume en un mot et un fait, lesquels n’ont pas besoin d’être expliqués, parce qu’ils portent en eux une évidence et une certitude. M. Catulle Mondes est un poète. Depuis les Contes épiques aux largos envols ; depuis le mystérieux et métaphysique Hespèrus ; depuis les boréales splendeurs et les saignantes neiges du Soleil de minuit, depuis Pagode, évoquant l’immémoriale énigme des farouches divinités de l’Inde accroupies parmi les flammes, au fond des temples, et tout embrasées d’or, où les strophes ont des sonorités de gong et des rythmes inquiétants de danses sacrées ; depuis les rires ailés, les mélancoliques sourires et les grâces attendries de l’Intermède ; depuis les Soirs moroses, ou sont pleurés, — avec quelle magnifique et douloureuse tristesse ! — les lassitudes, les souffrances, les effrois de l’amour et du doute, jusqu’aux modernes paysages dans lesquels la Grande Maguet dresse sa terrible silhouette de sorcière sublime, M. Mendès a fait œuvre de poète. Poète en ses drames que gonfle un souffle énorme d’épopée ; poète en ses études de critique, où il dit l’âme et le prodigieux génie de Wagner ; poète en ses fantaisies légères d’au jour le jour, harmonieuses et composées ainsi que des sonnets, en ses contes galants où, sous les fleurs de perversité et les voluptés féeriques et précieuses des boudoirs, percent parfois le piquant d’une ironie et l’amer d’un désenchantement ; poète en ses romans, surtout avec Zo’har, aux baisers maudits, même avec la Première Maîtresse, et qui no craint pas do descendre jusque dans le sombre enfer contemporain de nos avilissements d’amour, tout arrive à son cerveau eu sensations, en visions do poète, tout, sous sa plume, se transforme en images de poète, exorbitées et glorieuses, la nature, l’homme, aussi bien que la légende et que le rêve.