Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t1.djvu/155

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


J’ai voulu vivre ainsi sans amour et sans haine,
Et j’ai fermé mon âme au désir, qui n’amène
Que le regret, souvent le remords, après lui.

Mais je ne trouve, au lieu de la béatitude,
Au lieu du ciel rêvé dans l’âpre solitude,
Que la morne impuissance et l’incurable ennui.

(Rêveries d’un païen mystique.)


STOÏCISME


Sois fort, tu seras libre ; accepte la souffrance
Qui grandit ton courage et l’épure ; sois roi
Du monde intérieur, et suis ta conscience,
Cet infaillible Dieu que chacun porte en soi.

Espères-tu que ceux qui, par leur providence,
Guident les sphères d’or, vont violer pour toi
L’ordre de l’univers ? Allons, souffre en silence,
Et tâche d’être un homme et d’accomplir ta loi.

Les grands dieux savent seuls si l’âme est immortelle ;
Mais le juste travaille à leur œuvre éternelle,
Fût-ce un jour, leur laissant le soin de l’avenir,

Sans rien leur envier, car lui, pour la justice
Il offre librement sa vie en sacrifice,
Tandis qu’un Dieu ne peut ni souffrir, ni mourir.

(Rêveries d’un païen mystique.)