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DE LA MUSIQUE ALLEMANDE

offrir une plus digne leçon et un emblème plus touchant ?

Mozart accomplit cette œuvre avec la toute-puissance qui, je l’ai déjà dit, appartient en propre à la haute portée du génie allemand. Il s’empara si bien du genre de la musique italienne, qu’il s’y créa un domaine qui n’appartiendra jamais qu’à lui. Ses opéras furent écrits dans cette langue parce qu’elle passait alors pour la seule qui convînt à la déclamation lyrique ; mais il sut se garantir de tous les défauts inhérents à la méthode italienne, tandis qu’il ennoblit toutes ses qualités en les fondant si habilement avec la délicatesse et l’énergie du style allemand, qu’il produisit enfin quelque chose d’absolument neuf, et fait pour servir de modèle. Ce fut aussi le plus beau fleuron, l’épi le plus fertile de notre couronne dramatique ; et c’est à cela que l’Allemagne doit de pouvoir citer son école indigène de musique dramatique, car c’est seulement à dater de là que s’ouvrirent nos théâtres nationaux, et que nos musiciens composèrent des opéras sur des paroles allemandes.

Toutefois, avant l’avènement de cette époque mémorable, pendant que Mozart et ses prédécesseurs empruntaient aux modèles italiens des inspirations nouvelles, il se formait une autre école de drame lyrique populaire dont la combinaison définitive avec le genre italien produisit le véritable opéra allemand. Je veux parler des opé-