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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

pas à reconnaître en moi l’illumination du génie ! ou bien faudrait-il encore craindre la concurrence ? Le chat, par hasard ?… Entrons vite avant qu’il soit trop tard !

En disant ces derniers mots l’homme au soliloque voulut se précipiter dans la baraque de Polichinelle : je n’avais pas eu de peine à reconnaître mon ami, et j’étais bien résolu à lui éviter une fâcheuse démarche. Je le saisis par l’habit, et mes embrassements le forcèrent à se retourner de mon côté.

— Qui diable est là ? s’écria-t-il vivement. Il ne tarda pas à me reconnaître ; il commença par se débarrasser froidement de moi, puis il ajouta : J’aurais dû penser que toi seul pouvais me détourner de cette tentative, la dernière planche de salut qui me reste. Laisse-moi ; il pourrait être trop tard !…

Je le retins de nouveau ; je parvins même à l’entraîner un peu plus loin, vis-à-vis du théâtre, mais il me fut tout à fait impossible de l’éloigner entièrement de cet endroit.

Pourtant, je pris le temps de l’observer avec plus d’attention. Dans quel état le retrouvais-je, bon Dieu ! Je ne parle pas de son habillement, mais de ses traits. Celui-là était misérable, mais ceux-ci offraient un aspect effrayant. La bonne et franche humeur en avait disparu. Il portait autour de lui des regards fixes et inanimés ; ses joues pâles et flasques ne parlaient pas seulement