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UN MUSICIEN ÉTRANGER À PARIS

modeste chambrette ; mais s’il en est autrement, c’est à Paris que mon talent sera plus vite connu et plus dignement payé qu’en aucun autre pays du monde. Oh ! ne ris pas ainsi, et tâche plutôt de me répondre par quelque objection fondée.

— Mon pauvre ami, lui dis-je, je ne ris plus ; en ce moment, au contraire, j’éprouve pour toi et pour ton chien une inquiétude qui m’afflige profondément, car, quelque modéré que tu puisses être dans ton appétit, je sais que ce bel animal ne laissera pas de manger beaucoup. Tu veux nourrir toi et ton chien avec ton talent ? C’est un beau projet, car si notre propre conservation est le premier devoir qui nous soit imposé, l’humanité envers les animaux est le second et le plus beau. Mais dis-moi maintenant, quels moyens comptes-tu employer pour mettre ton talent en évidence ? Quels sont tes projets ? Voyons, fais-moi part de tout cela.

— Oh ! pour ce qui est des projets, je n’en manque pas, et je vais t’en soumettre un grand nombre. D’abord je pense à un opéra. J’en ai une bonne provision ; les uns sont entièrement terminés, les autres ne sont faits qu’à moitié ; d’autres encore, et en grand nombre, ne sont qu’ébauchés, soit pour le Grand-Opéra, soit pour l’Opéra-Comique. Ne m’interromps pas ! Je sais parfaitement que de ce côté les affaires ne marcheront pas très vite, et je ne considère ce