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nous construisions une mécanique et une physique mathématiques qui aient pour base la géométrie non-euclidienne au lieu de la géométrie euclidienne. Sera-t-il encore possible de prétendre que ces sciences nouvelles sont aussi vraies que la mécanique et la physique ordinaires ? Ne violeront-elles pas certains principes dont la vérité est universellement admise ?

Voici par exemple, le principe de relativité[1] d’après lequel l’état (température, potentiel électrique, etc.) d’un système de corps quelconques à un instant quelconque, et les distances mutuelles de ces corps, dépendent seulement de l’état initial des corps et de leurs distances mutuelles à l’instant initial, mais nullement de la position absolue initiale du système et de son orientation absolue initiale dans l’espace. Le principe s’impose à notre esprit parce qu’il est bien évident que nous ne pourrons jamais observer que des mouvements et des changements d’états relatifs. Nous l’érigeons donc en loi universelle de la nature. Eh bien ! Suppo-

  1. Il s’agit ici de la relativité que Poincaré a appelée physique dans ses dernières conférences (voir Scientia, septembre 1912 ; Cf. Dernières pensées, p. 42 et suiv.). La relativité à laquelle nous avons fait allusion ci-dessus à propos du livre de Russel sur les fondements de la géométrie, et dont il sera de nouveau question tout à l’heure, est une relativité beaucoup plus générale, que Poincaré appelle relativité psychologique.